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Agriculture de conservation : quels sont les avantages et inconvénients ?

Parce que se lancer dans l’agriculture de conservation des sols ne s’improvise pas et demande un véritable cheminement de la part des agriculteurs, s’informer sur les avantages et les inconvénients de ce type de pratiques agricoles s’avère essentiel. Le point en huit questions-réponses sur l’agriculture de conservation.

Agriculteur observant son sol non soumis au labour
© Christian Gloria

 

1. Qu’est-ce que l’agriculture de conservation des sols ?

Un système qui place le sol au coeur de la production agricole

L’agriculture de conservation des sols suscite bon nombre de questionnements.Concrètement, quel est ce mode de production agricole ? Selon  l’Association pour la promotion d'une agriculture durable (APAD), créée il y a plus de 20 ans, l’Agriculture de conservation des sols (ACS) est un « système de production agroécologique qui s’inspire de la nature, en plaçant le sol au coeur du système, pour produire efficacement et durablement ».

Les trois grands principes de l’agriculture de conservation

En d’autres termes, le point de départ de la production agricole est le sol, qu’il convient de considérer en adaptant ses techniques. La FAO (Food and Agriculture Organization) a officiellement défini l’agriculture de conservation des sols sous le spectre de trois grands principes :

La couverture maximale des sols

Par le biais de résidus de cultures ou de couverts végétaux semés

L’absence de travail du sol

Avec une tolérance pour la perturbation de la ligne de semis

La diversification des espèces cultivées

Grâce à des rotations longues et des cultures associées

 

« L’ACS, c’est une approche pragmatique issue du terrain, un mouvement ascendant venant des agriculteurs, depuis une trentaine d’années, qui se sont interrogés sur leurs pratiques pour transformer leurs techniques de production », résume François Mandin, président de l’APAD et agriculteur en Vendée.

Voir tous nos articles sur l’agriculture de conservation des sols 

 

2. Combien de temps dure la transition vers l’agriculture de conservation des sols ?

Un accompagnement possible dans la transition vers l’agriculture de conservation

Pour les agriculteurs désireux de se convertir à l’agriculture de conservation des sols, la phase de transition est l’un des enjeux qui nécessite patience et persévérance. « Aujourd’hui il est possible d’être accompagné pendant la période de transition ce qui n’était pas le cas auparavant, rassure Marjorie Lambert, consultante et fondatrice de l’agence d’accompagnement de projets agricoles et agroalimentaires AND Consulting. Une vision à court terme, purement opportuniste, ne va pas en faveur du développement de l’ACS.»

Se nourrir de l’expérience des agriculteurs qui pratiquent l’agriculture de conservation 

Cette phase de transition va induire un bouleversement qui doit s’accompagner d’un cheminement de la part de l’agriculteur. « Il ne faut pas hésiter à se préparer en amont en allant voir des agriculteurs qui pratiquent l’ACS, poursuit François Mandin. À partir de là, une réflexion concrète va s’amorcer pour démarrer la mise en œuvre de modifications des pratiques. Il faut pouvoir sauter le pas en arrêtant le travail du sol, en se séparant de la charrue, en stoppant le déchaumage. Les trois ou quatre premières années sont souvent les plus difficiles. »

Absence de références techniques en ACS sur certains territoires

Certains agriculteurs vont donc commencer progressivement. Et le fait d’être entouré dans cette démarche est une nécessité. « L’absence de références techniques sur un territoire est un véritable inconvénient en ACS. Il ne faut pas hésiter à chercher l’information sur des forums comme par exemple agricool.net et ne pas hésiter à se former, lors de tours de plaine. », confie Anne-Laure Durand, ingénieure agronome et agricultrice en Seine-et-Marne.

Lire aussi : Des agriculteurs engagés dans l'observation de la structure et de l'activité biologique des sols

 

3. En quoi la couverture des sols en agriculture de conservation est-elle stratégique ?

Un des piliers majeur de l’agriculture de conservation des sols

C’est l’un des piliers sur lequel repose l’ACS : la couverture des sols« Cela implique le maintien des résidus de culture en surface et l’implantation de couverts végétaux durant l’interculture, précise l’APAD. Le couvert végétal exerce des fonctions multiples parmi lesquelles la structuration du sol grâce au réseau racinaire, le recyclage des éléments minéraux et le développement de la biodiversité aérienne et souterraine en fournissant le gîte et l'alimentation des espèces présentes. » 

Le choix des couverts végétaux

La question des couverts végétaux est prépondérante et donne lieu à d’importants questionnements, notamment sur le choix des couverts. « Quand on prévoit un maïs derrière un blé en interculture longue, l’objectif est de pouvoir le semer sans travail du sol, ce qui dépend directement du type de couvert mis en place, illustre François Mandin. On sait que les légumineuses (féveroles, pois, trèfles) vont booster la réussite des semis de maïs et que d’autres espèces sont gélives (tournesol, graminées d’été, pois, millet). Les choix des couverts est très technique. »

De plus, si ces derniers représentent un atout agronomique indéniable, ils génèrent des coûts supplémentaires qu’il convient d’anticiper.

Lire aussi : Agriculture de conservation des sols : cinq conseils pour persévérer

 

4. Quel est l’intérêt environnemental de l’agriculture de conservation ?

« L'agriculture de conservation renforce la biodiversité et les processus biologiques naturels au-dessus et au-dessous de la surface du sol, ce qui contribue à accroître l'efficacité de l'utilisation de l'eau et des nutriments et à améliorer durablement la production végétale », définit la FAO.

Selon elle, les avantages environnementaux sont donc : 

La réduction de l'érosion des sols

L’amélioration de la qualité de l’eau et de la qualité de l’air

L’augmentation de la biodiversité et la séquestration du carbone

 

« On obtient dans l’idéal un agroécosystème dans lequel les régulations écologiques permettent de diminuer l’artificialisation du milieu (intrants, travail du sol), mais cela suppose des changements profonds dans la conduite des systèmes de culture par rapport à l’agriculture conventionnelle. », ajoute l’Inrae.

Lire aussi : La qualité de l'eau mieux préservée avec l’agriculture de conservation des sols

 

5. Pourquoi l’agriculture de conservation améliore-t-elle la productivité des sols ?

« Avec l’ACS on redonne une dimension de type prairiale à des terres cultivées. On va donc reconstruire un sol proche d’une prairie naturelle », considère François Mandin. La pratique de l’Agriculture de conservation des sols contribue ainsi à augmenter la teneur en matière organique des sols, et donc renforce sa capacité de rétention d’eau« La qualité du sol est améliorée par son enrichissement en matière organique et en vie microbienne », explique Anne-Laure Durand.

Est-il rentable de pratiquer l’agriculture de conservation des sols ?

« Le financement du risque lié à une transition en agriculture de conservation des sols doit être analysé au regard des économies de charges liées au matériel, au carburant et au temps de travail », souligne Marjorie Lambert. Le passage à l’ACS peut ainsi s’accompagner d’une baisse des coûts de production liés au travail du sol, avec une éventuelle réadaptation du matériel spécifique qui en résulte. 

Des charges de mécanisation pouvant être divisées par deux

« On peut vite arriver à diviser ses charges de mécanisation par deux, calcule le président de l’APAD. Avec l’augmentation de la matière organique en surface, on assiste à une réduction de la demande de puissance générée par les tracteurs. » Le raisonnement économique qui accompagne la phase de transition à l’ACS s’intéresse donc particulièrement à la mécanisation, mais tout dépend du système mis en place par l’agriculteur et des choix stratégiques qu’il fait. Anne-Laure Durand, par exemple, a dû réinvestir dans du matériel adapté à l’ACS et a fait le choix de conserver son ancien matériel pour garder une certaine souplesse.

Concernant les charges d’intrants, une baisse peut également être obtenue, de l’ordre de 50% d’après les estimations de l’APAD.

Lire aussi : Non-labour et ACS : quelles analyses de sol pour ajuster ses pratiques ?

 

6. Pourquoi la gestion des mauvaises herbes est-elle stratégique en agriculture de conservation des sols ?

Le labour étant un moyen de faire face aux mauvaises herbes et aux préjudices qu’elles peuvent engendrer sur les cultures, notamment des baisses de rendement, supprimer un travail du sol en profondeur peut donc avoir des conséquences directes sur le désherbage

« En ACS, il est nécessaire d’organiser un programme de désherbage chimique très performant le temps d’adapter les couverts et la gestion de l’interculture, prévient François Mandin. À terme, les charges de désherbage baissent de 10 à 20 %. »

 

7. Faut-il craindre les ravageurs en agriculture de conservation ?

1er levier : l’adaptation des dates de semis ou du choix variétal

« Plus on remet du vivant dans les sols, plus le vivant vient à nous. L’objectif recherché est donc de réduire l’impact des ravageurs des cultures », expose le président de l’APAD. Dans l’exploitation agricole de ce dernier, qui reconnaît qu’à certains moments les limaces ont causé d’importants dommages, plusieurs leviers peuvent être mis en place comme l’adaptation des dates de semis ou le choix variétal. « J’ai aussi augmenté de 15 à 20% ma densité de semis », poursuit l’agriculteur vendéen.

2ème levier : la gestion mécanique et la prédation naturelle

Pour Anne-Laure Durand, le risque de dégâts occasionnés par les limaces fait craindre une augmentation des charges liées aux moyens de lutte. Elle projette ainsi d’investir dans une herse à paille pour une gestion mécanique. Concernant les campagnols, le fait de compter sur la prédation naturelle des rapaces, en mettant en place des perchoirs pour les attirer, est une stratégie répandue.

 

8. L’accompagnement, une conclusion cruciale pour un changement réussi 

L’Agriculture de conservation induit donc de nombreux changements qui s’accompagnent d’un véritable cheminement mené individuellement par l’agriculteur, qui ne peut prendre le risque de s’affranchir des apports collectifs d’autres agriculteurs plus expérimentés. Le regard porté sur ces changements peut également être difficile à vivre, d’où la nécessité d’être accompagné et soutenu dans cette démarche.

Lire aussi : Sécheresse : « Grâce à l'agriculture de conservation, nos sols sont plus structurés »

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