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Quand le binage conditionne le choix du semoir à céréales

Recourir au binage sur céréales implique inévitablement une réflexion sur les interrangs, les systèmes de guidage ne résolvant pas tout. L'adéquation des largeurs de travail reste prégnante et le semis dissocié du travail du sol revient sur le devant de la scène.

Plusieurs facteurs favorisent le recours au binage sur céréales : l'agriculture biologique, la lutte contre les résistance aux herbicides, la réduction de l'IFT (-0,5 par désherbage mécanique) ou encore le confort des nouvelles technologies de guidage. « La principale problématique en céréales d'hiver, c'est la météo : l'efficacité d'une herse étrille est limitée en raison du faible nombre de jours disponibles. D’où l’intérêt de recourir au binage, qui se révèle d’autant plus intéressant pour minéraliser l'azote dans les systèmes en bio », rappelle David Roy, coordinateur technique d'Agrobio35. Mais il faudra veiller à ne pas endommager le système racinaire. « Les céréales y sont sensibles. Pour une culture à 15 cm, on retiendra généralement un soc de 80 mm », ajoute le spécialiste.

Le guidage RTK ne résout pas tout

Se pose alors la question de faire correspondre le nombre de rangs du semoir avec celui de la bineuse. « Je maintiens cette préconisation. Le guidage RTK ne suffit toujours pas à concilier des matériels de différente largeur », assure David Roy, comme plusieurs acteurs que nous avons interrogés. Malgré sa répétabilité dans le temps, la précision du signal RTK implique encore le maintien d'une distance de sécurité trop importante vis-à-vis de la culture. « Aucun GPS n’est capable de positionner la bineuse à 3 cm des rangs dans mon secteur où l’on trouve de nombreux dévers et des lisières de forêts… Certains clients paramètrent leur largeur de travail avec un ou deux centimètres de plus pour avoir une marge en cas de décalage d’un passage à l’autre », précise Luc Jeannerot, distributeur des bineuses Phenix et Hatzenbichler dans le Nord-Est de la France. « Attention aux semoirs à deux rangées d’éléments très espacées, même sur le plat », prévient aussi David Guy, le directeur de la marque Sky. La longueur des supports des éléments semeurs, qui offre un dégagement appréciable en présence de débris végétaux, sera pénalisante si le semoir travaille en crabe dans les pentes (l'écartement entre les rangs est alors affecté). Il existe toutefois une parade relativement onéreuse, qui consiste à adapter un disque de guidage et un second récepteur RTK dédiés au semoir.

Lire aussi : [DOSSIER] Tout savoir sur le désherbage mécanique de précision

Les interrangs larges en question

Dans le secteur couvert par Luc Jeannerot, certains semoirs à dents, tels que l’Aguirre porté de 7,20 m, permettent un binage de précision en coupant un rang sur deux. Et s’ils ont initialement été acquis pour implanter rapidement les couverts végétaux en été, les Horsch Avatar 12.25 SD (12 m) et Amazone Condor (12 et 15 m) font aujourd’hui le bonheur des agriculteurs du secteur confrontés à des vulpins résistants aux herbicides : la grande largeur et l'interrang de 25 cm s’accordent parfaitement avec les bineuses de 6 et 7,50 m.

« On sait biner du lin à 12,5 cm sur le plateau du Neubourg, mais dans des zones moins avantageuses, je conseille aujourd’hui un minimum de 16,67 cm », note Mathias Bounon, dirigeant de Phenix Agrosystem. Certains agriculteurs optent pour des écartements larges, supérieurs à 25 cm, malgré leur impact sur le rendement de la culture, la moindre interception lumineuse pénalisant alors le nombre d’épis par mètre carré. Mais fermer un rang sur deux avec des semoirs à 15 ou 16,7 cm d'écartement est jugé risqué par David Roy : « A 30 cm ou plus, il faudra obligatoirement réussir à passer au bon moment, sinon les adventices garderont trop longtemps leur accès à la lumière ». Pour Luc Jeannerot, qui intervient dans une zone à faible potentiel où la préparation se veut la plus économique possible, «  le bon vieux Nodet GC reste une alternative pour implanter la céréale à 25 cm en fermant un rang sur deux. »

Retour au semis décomposé

Dans le croissant argilo-calcaire qui s'étend du Poitou-Charentes aux Ardennes, où les rotations courtes ont favorisé le développement des résistances aux herbicides sélectifs, les exigences en débit de chantier plaident pour dissocier le semis du travail du sol. D'où le retour en force de semoirs solo très larges. « L’expansion de l’agriculture biologique et la volonté croissante des exploitations conventionnelles de mettre en œuvre une stratégie de désherbage mécanique rendent les machines de ce type de plus en plus attractives (...) Pour le binage, l’interrang de 25 cm, la conception sur une rangée et une grande largeur de travail sont des critères primordiaux », assurait Mickaël Horsch en 2019, lors de la présentation du semoir traîné Serto 12 SC. La rigidité latérale des éléments semeurs, capitale pour respecter l'interrang, est d'ailleurs mise en avant, tout comme la consolidation préalable du sol assurée par le rouleau. Cette dernière action est appréciable lors de binages précoces où le risque de recouvrir des plantules est accru en cas de sillon creusé.

Le semoir Sky Maxidrill SW (6 ou 9 mètres – 15 cm d'interrang) a aussi anticipé cette tendance. Depuis l'Agritechnica 2019, ses deux têtes de répartition n'alimentent plus un côté chacune, mais un rang sur deux. Il est donc aisé de passer à un inter-rang de 30 cm. En vue du binage, le constructeur vient même d'y ajouter un automatisme pour respecter l'écartement entre deux passages.

 

Implanter les céréales avec un semoir monograine ?

« Des observations sur le terrain montrent que la qualité du plombage des graines associée à la régularité de profondeur de semis limitent les pertes lors de l’utilisation de solutions de désherbage mécanique », relevait Monosem en 2019, lors de la présentation d'un semoir monograine et d'une bineuse 17 rangs à 25 cm. Des essais en production de semences ont en effet montré un impact positif avec les variétés hybrides sensibles au placement de graine. En limitant les pertes, il est possible d’abaisser la densité de semis, en passant sous les 100 grains/m². La régularité de profondeur et le rappui par le roulette induisent des levées rapides et homogènes, d'où une moindre sensibilité à la verse et aux maladies. Après le passage des éléments semeurs Monoshox NG Plus équipés de roues de jauge et de trémies étroites, ainsi que d’un bloc tasseur arrière compact pour obtenir un interrang de 25 cm, le constructeur des Deux-Sèvres préconise le recours à la bineuse Multicrop « Compact » (18 à 65 cm d'inter-rang) dotée d'un nouvel élément court à roue avant étroite et du relevage hydraulique des éléments, en cohérence avec la coupure de rangs par GPS dont dispose le semoir.

 

Interrangs larges : un peuplement difficile à compenser

« Le nombre de grains par mètre carré reste en retrait dans les implantations avec des interrangs de 25 cm ou plus, par rapport aux semis traditionnels à moins de 20 cm. En moyenne, la baisse est de 6 % pour des écartements de 25 cm. Elle atteint 15 % pour ceux de 35 cm », prévient Arvalis à l'issue d'essais sur blé tendre. Le moindre accès à la lumière, à l'eau et aux éléments minéraux, la baisse du tallage (-10 à -30 %) et de la concurrence avec les adventices, ne sont pas compensés totalement par une épiaison accrue. L'effet variétal reste important, notamment avec des variétés à port dressé (ex : Caphorn). La perte se révèle logiquement moindre dans les sols à faible potentiel, en particulier en cas de sécheresse. Des essais sur le désherbage mixte en blé dur, conduits en 2015 et 2016 en région PACA, donnaient ainsi l'avantage à l'interrang de 21 cm avec un binage, en comparaison à des interlignes de 7 et 14 cm avec deux passages de herse étrille.

 

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