Aller au contenu principal

Chez Quentin et Dominique Gougeon, les haies sont un patrimoine à valoriser

Sur l’exploitation de Quentin et Dominique Gougeon à Vaiges en Mayenne, les haies sont conduites comme une culture à part entière et apportent une rémunération supplémentaire à l’élevage.

« Par manque de main-d’œuvre, on a passé vingt ans sans tirer parti du bois. Pour autant, on a toujours conservé les haies sur l’exploitation, avant tout pour l’abri qu’elles fournissent aux animaux contre le vent et le soleil mais également pour les auxiliaires de cultures et ce, encore davantage depuis notre conversion, en 2016, en agriculture biologique. On a redémarré la valorisation du bois bûche pour le chauffage familial, il y a une dizaine d’années », explique Quentin Gougeon à la tête avec son père d’un troupeau de 55 mères charolaises, 3 poulaillers de volailles de chair, 150 hectares de SAU et 9,8 km linéaires de haies en gestion, dont 1/10e de haie nouvellement plantée. L’objectif, dans un premier temps, étant de délimiter l’exploitation avec les haies puis, dans un second temps, de fermer l’ensemble des parcelles. Les premières implantations ont débuté en 2016 avec 750 mètres linéaires de haies bocagères multiespèces (chênes, châtaigniers, noisetiers, fusains, troènes…). « On avait envie de retrouver une valorisation de cette ressource, d’où notre rapprochement avec la SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) Mayenne bois énergie, avec en tête l’idée que le bocage puisse fournir du bois pour une filière locale. »

Essayer de ne pas brider la haie

« Pour l’entretien des haies, on a investi dans un taille-haie d’une coupe d’1,80 mètre, en 2016. Moins agressif que l’épareuse, on peut en plus l’atteler à un petit tracteur. On réalise un travail pour contenir la haie. On ne cherche pas à aller trop loin. Cela nous permet d’effectuer un entretien sans dégâts tout en redensifiant la haie. On monte jusqu’à 3,60 mètres. L’acquisition du taille-haie a également entraîné une diminution des coûts d’entretien, grâce à l’utilisation d’un plus petit tracteur », précise Quentin Gougeon.

L’entretien des haies présentes dans les champs de cultures s’effectue tous les deux ans, en août. Dans les prairies, les éleveurs interviennent tous les automnes. En moyenne, « on compte 10 jours par an de travail pour s’occuper de l’entretien des clôtures et des haies. On a reculé le travail du sol entre la culture et la haie pour ne pas brider le développement de celle-ci. À l’inverse, dès qu’une haie empiète trop sur les prairies ou les cultures, on déclenche une exploitation du bois. »

La récolte du bois a lieu entre décembre et janvier. En 2020, 90 tonnes de bois vert ont été récoltées (soit 3 bennes de 15 tonnes, montées en ensilage). Les exploitants ont commercialisé 50 tonnes de bois, gardé 30 tonnes pour la litière des bovins et 10 tonnes pour le chauffage personnel. Le bois est abattu à la tronçonneuse. La Cuma de Cepvil qui travaille avec la SCIC a investi dans une pince de débardage pour éviter les risques de corps étrangers et optimiser le rendement du chantier. « À la récolte, on réalise des tas de 2 mètres de haut et on fait attention à avancer dans le même sens. Le jour du déchiquetage, le bois est ramené sur une plateforme. Le débit moyen des machines est de 30 tonnes à l’heure. Dans la semaine qui suit le chantier, le bois est chargé en camions et transporté à la SCIC. »

« On bénéficie gratuitement des avantages des haies »

« Aujourd’hui, notre rendement est à améliorer. Nous avons pris du retard sur la valorisation de nos haies mais on compte se rattraper. Au final, j’arrive à dégager entre 5 et 10 euros la tonne, net, main-d’œuvre comprise, suivant l’organisation du chantier. Le bois vendu rémunère donc notre travail. Un chantier bois se prépare comme un chantier d’ensilage. Il ne faut pas négliger la mise en tas et être vigilant en ce qui concerne la logistique pour le transport », souligne Quentin Gougeon.

 
 

Chiffres clés

55 mères naisseur-engraisseur de bœufs
3 bâtiments de volailles de chair de Loué
150 ha (80 de prairies, 50 de cultures de vente, 10 de luzerne, 10 de mélange céréales-protéagineux)
2,7 UTH (2 associés, 1 salarié 2 j/sem, 1 apprenti à quart-temps)
10 km linéaires de haies

30 tonnes de plaquettes pour la litière des mères

Pour la seconde campagne, les éleveurs utilisent des plaquettes de bois pour la litière des mères. « Les plaquettes sont étalées dans la stabulation en juin juillet pour les animaux qui rentrent se nourrir. Au retour en bâtiments, mi-novembre, elles servent de sous-couche (10-15 cm) à la paille (paillage 10 kg/j). En janvier, la stabulation est curée et à ce moment-là, seule de la paille est utilisée. En termes de travail, cela ne change rien », observe Quentin Gougeon.

Les plaquettes sont stockées dans le hangar à paille vide en janvier. Elles laissent leur place à la paille au mois d’août. Quatre mois sans « toucher » au tas de bois après le déchiquetage (dont trois semaines de fermentation avec élévation de température jusqu’à 70 °C) sont nécessaires à leur mise en tas pour un bon séchage des plaquettes. « Sinon, il est possible de bâcher les plaquettes en extérieur en utilisant des bâches respirantes. »

 

La SCIC Mayenne bois énergie valorise 6 200 tonnes de bois vert durable

Le bois qui transite par la SCIC est issu d’une filière éthique et doit respecter un cahier des charges qui indique la façon de découper le bois.

La SCIC Mayenne bois énergie a été créée en 2009. Ce type de structure fonctionne sur le même principe qu’une coopérative sauf que les collectivités locales, associations environnementales, clients… peuvent également prendre des parts.

« La SCIC Mayenne bois énergie se charge d’organiser les chantiers de déchiquetage, d’évaluer les besoins de stockage, la relation clients, les audits terrain… Après dix ans de fonctionnement, elle compte une centaine d’agriculteurs fournissant 13 plateformes de séchage et 40 chaudières collectives. En dix ans, on est ainsi passé d’une valorisation de 500 tonnes de bois vert à 6 200 tonnes. Pour le déchiquetage du bois, on s’appuie beaucoup sur la Cuma de Cepvil (Cuma d’étude, de promotion et de valorisation des initiatives locales) qui a débuté cette activité en 1997 avec trois adhérents et qui, aujourd’hui, en compte 400, pour un volume de 15 000 tonnes de bois plaquettes par an. Ce volume transite par la SCIC pour un tiers environ, est autoconsommé pour le chauffage des agriculteurs pour un autre tiers et sert au paillage (litière, plantation) pour le dernier tiers », souligne Olivier Lepage, chargé de développement à la SCIC Mayenne bois énergie.

Trois chauffeurs et deux déchiqueteuses Biber 78 sont à la disposition des adhérents. Ces dernières revêtent plusieurs avantages : attelage sur tracteur, facilité de déplacement, moins de contraintes pour rentrer dans les parcelles. Quatre grilles de granulométrie permettent également de répondre aux différentes demandes des agriculteurs et sans coût supplémentaire.

Un bois rémunéré 55 euros la tonne

« Les agriculteurs représentent 80 % de l’approvisionnement de la SCIC. Idéalement, on recherche des bois d’au minimum 20 centimètres de diamètre, pour des plaquettes homogènes et un chantier économique. Le bois qui transite par la SCIC est issu d’une filière éthique et doit respecter un cahier des charges qui indique la façon d’abattre le bois. Pour cela, on accompagne les exploitants et on réalise leur plan de gestion consultable en ligne (priorité de coupe, état de la haie…). La SCIC a visité cette année 270 kilomètres de haies sur 35 fermes en plan de gestion. »

Le bois est acheté 55 euros la tonne de bois vert arrivé plateforme. Si le cahier des charges n’est pas respecté, un dégrèvement est effectué et on tombe à 40 euros la tonne. L’harmonisation du cahier des charges a donné lieu à la création du label haie. Pour des raisons de trésorerie, l’agriculteur est payé à la vente du bois. A l’avenir, l’objectif est de créer un observatoire des coûts pour permettre une hausse de la rémunération des agriculteurs par l’amélioration des chantiers.

Les plus lus

élevage de vaches de race aubrac en Lozère
« Avec nos 90 vaches aubracs et 60 génisses à l’engraissement, nous dégageons 50 000 euros de revenu disponible pour deux associés »

En Lozère, David et Ludovic Cayrel élèvent 90 vaches aubracs et 60 génisses à l’engraissement chaque année. La valorisation de…

éleveurs bovins viande bâtiment charolaise
« Nous faisons naître 360 veaux dans l’hiver sous un même bâtiment »

Le Gaec Gauthé, dans la Nièvre, a choisi il y a une vingtaine d’années de faire vêler dans un grand bâtiment les vaches…

Frédéric Busarello, éleveur de limousines et de comtoises situé à Ceyrat dans le Puy-de-Dôme
Astuce d'éleveur : des piquets fixés par du sable dans des manchons de PVC

Situé en zone pavillonnaire, Frédéric Busarello, éleveur de limousines et de comtoises, a dû tenir compte des contraintes…

Jean-Michel, Michelle et leur fils Damien : « Le bâtiment, peu profond, permet de voir tout le troupeau en un coup d'œil. »
Bâtiment d’élevage : « Nous avons changé plusieurs fois d’avis avant d’aboutir à un projet façonné selon nos besoins »

Jean-Michel, Michelle et Damien Martin, situés dans la Creuse, ont lancé leur projet de bâtiment en 2019. Entre l’idée de…

Les marchés de bétail vif font face à la décapitalisation

En 2023, les marchés de bétail vif ont enregistré une baisse d’activité de 8,8 %, en lien notamment avec la décapitalisation.…

« Ma rotation n’est pas figée. Elle est plutôt opportuniste et s’adapte en fonction des rendements », explique Fabien Fabre, basé à Cassagnes-Bégonhès dans ...
« Je produis toute l’alimentation des vaches allaitantes en semis direct sous couvert »

Au cœur de l’Aveyron, l’EARL Mazel Fabre produit toute l’alimentation de ses vaches allaitantes en semis direct sous couvert…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site bovins viande
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière bovins viande
Consultez les revues bovins viande au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière bovins viande