« Arriver au point mort grâce aux sans IG »
Michel Chapoutier, président de l’UMVin, l’Union des maisons de négoce, a partagé ses positions sur trois sujets d’actualité. Interview.
Michel Chapoutier, président de l’UMVin, l’Union des maisons de négoce, a partagé ses positions sur trois sujets d’actualité. Interview.
Je suis assez inquiet. Suite à la faible récolte de cette année, nous risquons de nous retrouver en situation de crise dans deux ans. Je m’explique : cette année, le négoce va puiser dans ses stocks pour alimenter les marchés dans la mesure du possible. Et il va absorber le surcoût sur le 2017 en rognant sur ses marges. Mais l’année prochaine, le négoce va devoir reconstituer ses stocks. Il y aura donc de la tension sur les marchés, ce qui entraînera un risque d’emballement de la production au niveau des prix : elle voudra conserver les niveaux acquis cette année. Or le marché ne peut pas absorber ces hausses de prix. Toutes les dernières crises sont nées de la sorte.
Il y a des projets de vignes sans IG dans des zones non AOC, avec contractualisation, non pas avec des vignerons, mais des agriculteurs. Car la viticulture ne veut pas reconnaître qu’elle a besoin des sans IG, tout comme les chefs étoilés ont eu besoin des bistrots pour équilibrer leurs finances. Le politique tue l’économique. Or il y a une vraie logique économique à développer des sans IG, en plus des signes de qualité, sur une même exploitation. Ce segment devrait non pas être la somme des invendus, mais permettre aux vignerons d’atteindre le point mort sur leur domaine, c’est-à-dire de payer les charges ; la marge étant ensuite réalisée sur les AOC et/ou IGP. Pour ce faire, les vignes doivent être établies sur un modèle de 1 000 pieds par hectare, avec un rendement de 200 hectolitres par hectare, et 70 à 100 heures de travail par hectare. Avec des volumes contractualisés. À l’heure actuelle, l’une des limites est l’accès à l’eau. Nous allons donc défendre les lacs collinaires dans le cadre des États généraux de l’alimentation.
L’une de mes craintes est que la viticulture soit prise en otage par la transversalité, et traitée comme les autres cultures. En ce qui concerne les contrats de filière, nous partageons tous le même constat. Mais y aura-t-il un vrai courage collectif ? C’est la question. En tout cas le président et le premier ministre ont une vraie volonté d’avancer.