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Comment mieux détecter les virus des arbres fruitiers

Le changement climatique affecte le comportement des arbres fruitiers et celui des agents pathogènes qui sont susceptibles de les infecter. Une étude du CTIFL afin de caractériser la saisonnalité du diagnostic en virologie fruitière est en cours.

L'enroulement chlorotique de l'abricotier fait partie des maladies virales étudiées par le CTIFL afin de caractériser la saisonnalité du diagnostic.
L'enroulement chlorotique de l'abricotier fait partie des maladies virales étudiées par le CTIFL afin de caractériser la saisonnalité du diagnostic.
© RFL

De nombreux phytovirus sur arbres fruitiers ont des impacts sur la production fruitière. Les maladies causées par ces phytopathogènes peuvent être latentes et non visibles sans nécessairement entraîner la mort des arbres. Néanmoins, elles peuvent altérer la vigueur de l’arbre ou sa croissance, et conduire à des anomalies lors de la mise à fruit. Ainsi, ces maladies peuvent être à l’origine d’une baisse du rendement et des pertes économiques. La surveillance sanitaire des virus et assimilés représente donc un enjeu à ne pas négliger. Avec les échanges de matériel végétal qui s’opèrent continuellement entre les pays au sein et en dehors de l’Union européenne, la filière est particulièrement vulnérable.

D’autant plus qu’il n’y a actuellement aucune possibilité d’assainissement du matériel fruitier à l’échelle d’une pépinière ou d’un verger. Lorsqu’un arbre est infecté par un virus, un viroïde ou un phytoplasme, l’arrachage de l’arbre devient la seule solution. Ces pathogènes sont principalement transmis par voie indirecte, comme les outils de taille ou des insectes vecteurs. La connaissance du cycle de vie des insectes vecteurs et de leur appétence pour les espèces fruitières est donc essentielle afin de mettre en œuvre des mesures préventives et de cibler la lutte.

Déterminer les paramètres qui influencent le diagnostic

Une des mesures préventives consiste à exercer une surveillance accrue de l’état sanitaire des pépinières et des vergers par le renforcement de la traçabilité du matériel végétal au sein même du territoire français, mais également lors d’importation d’une autre provenance. Cette surveillance s’établit sur la base d’un diagnostic précis, alors que l’identification, la détection et la caractérisation des phytovirus sont difficiles. En effet, l’arbre peut présenter une charge virale faible ou répartie de manière inégale, les agents pathogènes peuvent se retrouver en infections mixtes ou présenter une variabilité d’intensité des symptômes.

Une étude est actuellement menée au CTIFL afin de déterminer les paramètres susceptibles d’influencer le diagnostic de ces phytovirus, comme la période de prélèvement. L’objectif est de définir une stratégie de surveillance sanitaire du matériel fruitier. Les résultats de l’ensemble de l’étude sont attendus pour le deuxième trimestre 2024. Plusieurs facteurs sont d’ores et déjà connus pour induire des fluctuations sur le cycle de multiplication virale et sur la répartition et la localisation de l’agent pathogène dans l’arbre. En effet, la plupart des virus sont thermosensibles, ce qui signifie que des températures élevées ou trop basses bloquent le cycle de réplication virale.

Sept périodes de prélèvements dans l’année

Sous l’effet de la chaleur ou du froid, les virus sont moins nombreux et leur mouvement à l’intérieur de l’arbre est perturbé. À l’inverse, les viroïdes se distinguent des virus par leur résistance à la chaleur. Les phytoplasmes sont dépendants des mouvements saisonniers de sève. Toutes ces connaissances déjà acquises dans de précédentes études font écho aux changements climatiques observés, avec des hivers de moins en moins rigoureux et des épisodes caniculaires qui se multiplient.

La question est de savoir si les méthodes d’analyse couramment utilisées dans les plans de surveillance sanitaire du matériel fruitier ont la capacité de détecter les agents pathogènes visés à tout moment de l’année et ce, sur n’importe quel matériel prélevé pour analyse. Les paramètres qui peuvent influencer la détection des virus et assimilés suivis dans cette étude sont la période de prélèvement de l’échantillon, la matrice prélevée pour analyse et la répartition de l’agent pathogène dans l’arbre. En fonction des saisons, les prélèvements s’opèrent sur sept périodes distinctes dans l’année sur deux types de matrice, essentiellement feuille ou rameau.

Pas d’effet « période » pour les phytoplasmes

Les treize agents pathogènes étudiés ont été sélectionnés soit par rapport à leur incidence sur les espèces fruitières qu’ils infectent, soit pour évaluer des possibilités d’optimisation de protocoles, en particulier sur la partie prélèvement de la matrice. La détection ne semble être influencée par aucun des paramètres étudiés pour le Plum pox virus, le Cherry virus A, le Cherry leaf roll virus et le viroïde Peach latent mosaic viroid.

En revanche, des premiers éléments de variabilité de détection ont été observés selon la matrice analysée corrélée à la période de prélèvement pour les virus Apple chlorotic leaf Spot virus, Apple mosaic virus, des Apple rubbery wood virus 1 et 2 et des virus Little Cherry 1 et 2. Ces éléments devront être confirmés sur les deux prochaines années de l’étude. En ce qui concerne les phytoplasmes, il n’y a pas eu d’effet de la période de prélèvement et de variabilité sur la répartition dans l’arbre sur la capacité de diagnostic. En revanche, la matrice ainsi que le choix de la méthode d’analyse utilisée en fonction de la période de prélèvement semblent avoir un effet.

Plus d’une douzaine de pathogènes ciblés

Plum pox virus (PPV)

Le virus PPV infecte les Prunus et provoque des nécroses sur l’épiderme des fruits qui entraînent leur chute ou les rendent non commercialisables. Ce virus a une phase de latence qui peut être longue et peut conduire à sa dissémination par les insectes vecteurs avant même que les symptômes soient observés sur l’arbre malade.

Enroulement chlorotique de l’abricotier (ECA)

Le phytoplasme responsable de l’ECA provoque divers symptômes plus ou moins sévères selon les espèces. Il a un impact particulier sur abricotier et prunier qui pouvent mener au dépérissement des arbres et être à l’origine d’une réduction de calibre des fruits, voire leur chute.

Prolifération du pommier ou Apple Proliferation (AP)

La maladie AP ou « des balais de sorcière » provoque des dérèglements hormonaux chez le pommier, qui engendrent une croissance anarchique de nombreux rameaux et induit une chute des fruits juste après la nouaison, ainsi qu’un retard de croissance et de maturation de ceux qui restent accrochés.

Dépérissement du poirier ou Pear Decline (PD)

La maladie du Pear Decline sur les poiriers provoque une réduction drastique de la croissance de l’arbre et des défoliations précoces.

Peach latent mosaic viroid (PLMVd)

Le PLMVd est un viroïde spécifique à l’espèce pêcher, à l'origine de retards de végétation et de floraison jusqu’à induire des bosses et des sutures craquelées sur fruits.

Cherry leaf roll virus (CLRV) sur noyer

Sur l’espèce noyer, le virus CLRV transmis par le pollen entraîne une réduction de la production et un vieillissement prématuré des arbres.

ACLSV (Apple chlorotic leaf Spot virus), ApMV (Apple mosaic virus) et ARWv 1 et 2 (Apple rubbery wood virus 1 et 2)

Le virus ACLSV sur pommier se manifeste par un ralentissement de la croissance et des taches sur feuilles et sur fruits. Cependant, des dépérissements plus marqués peuvent apparaître en co-infection avec d’autres virus. Le virus ApMV provoque des taches chlorotiques sur jeunes feuilles du printemps. Les virus ARWv 1 et ARWv 2 engendrent des nécroses et une souplesse anormale des branches. Les arbres symptomatiques sont affaiblis et produisent peu de fruits.

ACLSV sur cerisier, prunier et pêcher, Cherry virus A (CVA) sur cerisier et virus Little Cherry 1 et 2 (LCh 1 et 2) sur cerisier

Le virus ACLSV est surtout virulent en co-infection avec d’autres virus et accentue des défauts déjà présents sur écorce, feuilles et fruits. Le virus CVA, retrouvé principalement en co-infection, se transmet essentiellement par le pollen des arbres malades. La maladie de la « petite cerise » ou Little Cherry 1 et 2 est causée par deux agents viraux distincts qui affectent non seulement la taille du fruit, mais également sa couleur et sa saveur.

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