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Pruneau d’Agen : comment une interprofession peut se réformer

Le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt a publié le 10 octobre le rapport du CGAAER sur la réorganisation de la filière « pruneau d’Agen ».
Missionné par le précédent ministre de l’agriculture, le CGAAER1 a conduit pendant dix mois une mission de médiation destinée à débloquer le fonctionnement de l’interprofession du pruneau d’Agen et en accompagner la réorganisation. La démarche n’est pas courante, mais s’explique par le risque de disparition d’une filière particulièrement importante pour la région concernée, employant environ 10 000 personnes.

Tensions entre professionnels

À l’origine des difficultés rencontrées par la filière, le rapport pointe les tensions entre producteurs (trois OP coopératives regroupant 500 adhérents, deux OP dites associatives avec 900 adhérents, mais aussi une situation originale des syndicats professionnels avec une coordination rurale majoritaire dans le principal département concerné et un syndicat local, le GED2 historiquement très présent et actif), entre industriels (concurrence croissante de produits chiliens et repli sur le marché hexagonal entraînant la perte de «petits opérateurs » et la « surdominance » du groupe France Prune) et entre producteurs et industriels (baisse des revenus des producteurs et délais de paiement). En filigrane, on comprend que deux autres facteurs peuvent être ajoutés : l’omniprésence d’un même groupe, la coopérative France Prune, non seulement sur le plan industriel par sa filiale Maître Prunille, mais aussi dans le collège producteur, ainsi que l’abandon de la négociation et de la détermination interprofessionnelles des prix à la production.

Réorganisation de la gouvernance

La réorganisation adoptée emporte d’abord une simplification de la gouvernance, avec la disparition du CNIPE3 et une organisation verticale chapeautée par un organe de direction et de négociation interprofessionnelles, le CIPAg4 composé d’un collège production (regroupement des cinq OP constituant l’AOPn) et d’un collège transformation, chaque collège comptant dix membres au plus. Le BIP5, quant à lui, devient un outil de mise en œuvre des décisions du CIPAg, qui en compose le conseil d’administration. Elle implique aussi une modification des modalités de prise de décision, au principe « un membre une voix » étant substituée une prise en compte du poids économique de chaque membre (hectares de vergers pour les OP, tonnage pris en charge pour les industriels), toute décision devant être acceptée par 50 % au moins des hectares (collège production) et 75 % du tonnage (collège transformation).
Au-delà de la réorganisation des structures, la médiation a permis le regroupement des OP associatives dans une Sica avec transfert de propriété représentant 60 % de l’offre, ce qui est de nature à contrebalancer le poids du groupe coopératif dominant et l’acceptation par ce dernier d’une remise en prééminence de l’organisation interprofessionnelle. Sur le plan économique, si la négociation d’un prix interprofessionnel est abandonnée, la prise en compte du prix de revient des producteurs est affirmée comme une donnée au moins aussi importante que la situation du marché. Parallèlement, il est fait appel à la capacité des acteurs de l’export à répondre de façon concertée à la concurrence, voire à l’abandon de toute politique agressive entre opérateurs. Mais il ne faudrait pas que la reconstruction de ce bel édifice, mis à mal par l’abandon juridiquement vertueux d’une entente sur les prix du produit de base, soit elle-même compromise par une entente trop étroite sur la politique commerciale relative au produit transformé.

1. Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux.
2. Groupement d’étude et de défense de la prune d’Ente de l’agenais.
3. Comité national interprofessionnel de la prune d’Ente.
4. Comité interprofessionnel du pruneau d’Agen.
5. Bureau interprofessionnel du pruneau.
Rédaction Réussir

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