Loi d'Avenir : Vers une remise en cause du collecteur déclaré ?
Le projet de loi d'Avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt arrive en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. C'est l'occasion de faire le point sur une disposition concernant le Groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE), fer de lance de la « double performance écologique et économique », qui fait débat entre et au sein des deux chambres du Parlement.
Rappelons que les GIEE doivent permettre aux exploitants agricoles de se réunir autour d'un projet agricole favorable à l'environnement, leur permettant non seulement de remplir les nouvelles conditions posées par le verdissement de la Pac et répondre ainsi à la conditionnalité des aides, mais aussi de se voir attribuer conjointement une majoration d'aides qui serait versée au GIEE.
Outre cette contrepartie, les alinéas 11 et 12 de l'article 3 du projet de loi prévoyaient la possibilité pour les céréaliers de commercialiser directement leur production par le biais du GIEE, sans passer par un collecteur de céréales déclaré, intermédiaire jusqu'alors obligatoire.
Les députés rejettent la libéralisationMalgré quelques propositions libérales (un amendement s'inscrivant dans la philosophie de la promotion des circuits courts tendait notamment à totalement désencadrer le commerce des céréales) cette possibilité a été rejetée par le palais Bourbon. Les députés ont fait valoir que les collecteurs déclarés, bien loin de constituer un outil de dirigisme économique, jouaient un rôle essentiel dans le fonctionnement et la transparence du marché des céréales, en garantissant les éléments fondamentaux des transactions (traçabilité, tonnage, qualité des produits) et en collectant et transmettant un large éventail de données statistiques à FranceAgri-Mer, favorisant la bonne connaissance du marché.
Ils ont par ailleurs rappelé que les producteurs de céréales disposaient déjà de la faculté d'être reconnus collecteurs s'ils respectaient certaines normes techniques, et fait valoir que les producteurs usant de la faculté envisagée resteraient soumis à des obligations de déclaration, ce qui représenterait pour eux un coût plus élevé que celui auquel doivent faire face les collecteurs déclarés, plus habitués et mieux équipés pour remplir ces missions. D'après eux enfin, une telle contrepartie favoriserait des calculs opportunistes, au détriment de l'objectif initial, purement environnemental. La perspective de créer un dangereux précédent aboutissant à une libéralisation généralisée du commerce des céréales, produit stratégique, termina d'inciter la chambre basse à transmettre aux sénateurs un texte amputé de cette disposition. Traditionnellement moins aventureux que les députés, les sénateurs ont pourtant rétabli le texte, notamment en ce qu'il permettait aux producteurs de ne plus faire physiquement transiter leurs céréales par un collecteur.
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La justification de la suppression de cet intermédiaire résiderait, selon la sénatrice dépositaire de l'amendement rétablissant la disposition, dans la volonté de pousser les GIEE à « concrétiser une conduite économique d'ensemble des exploitations les composant », s'insérant finalement bien dans l'objectif général de double performance économique et environnementale. Les sénateurs ont toutefois décidé de maintenir l'intermédiaire du collecteur déclaré pour la déclaration des produits commercialisés, tandis que les diverses taxes parafiscales seraient directement versées à FranceAgriMer.
Les professionnels sont globalement mécontents du revirement opéré par le Sénat et espèrent voir les députés persister dans leur refus de cette disposition. Certains craignent en outre des difficultés de recouvrement de la cotisation interprofessionnelle.
C'est en cet état que se présente à la deuxième lecture de l'Assemblée une disposition qui ne devrait pas manquer de nourrir la discussion.