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La proposition de la Commission provoque un électrochoc

Bruxelles propose une suppression des restitutions à l’exportation dans le cadre d’une relance du cycle de l’OMC. Syndicats et gouvernement protestent mais la France apparaît plus que jamais isolée sur ce dossier.

Le coup est parti d’une lettre adressée par la Commission européenne aux membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans ce courrier dont le contenu a été révélé par le Financial Times lundi, Pascal Lamy, commissaire européen au Commerce, et son homologue de l’Agriculture Franz Fischler ont proposé de supprimer les subventions européennes à l’exportation des produits agricoles, afin de relancer le processus de négociations commerciales multilatérales dans le cadre du cycle de Doha, en panne depuis l’échec du sommet OMC de Cancun en septembre dernier.

Révélée en pleine réunion informelle des ministres européens de l’Agriculture à Killarney en Irlande, cette annonce a provoqué un électrochoc dans l’opinion agricole européenne que la Commission a tout de suite tenté de relativiser. Lundi après-midi, lors d’une conférence de presse organisée en marge de la réunion de Killarney, Franz Fischler confirmait l’existence de cette lettre, en prenant soin de la présenter comme une offre conditionnelle. Si l’Union européenne est en effet prête à « éliminer» ses subventions à l’exportation de produits agricoles, c’est seulement si ses partenaires de l’OMC en font autant, a-t-il assuré. « Nos partenaires doivent dire clairement qu’ils sont prêts à suivre totalement l’UE pour toutes les formes de soutien à l’exportation», a déclaré M. Fischler. Le commissaire a notamment pointé du doigt « les crédits à l’exportation ou les abus de l’aide alimentaire », par lesquels les états-Unis subventionnent à hauteur de plusieurs milliards de dollars chaque année leurs exportations agricoles (3,2 md$ en crédits à l’exportation en 2003). L’offre européenne « est clairement conditionnée au fait que nos amis américains, nos amis australiens ou nos amis canadiens s’engagent eux aussi à éliminer toutes les formes de subventions à l’exportation qui entraînent des distorsions de concurrence », a-t-il ajouté.

Le mandat «outrepassé»?

La révélation de cette proposition a soulevé immédiatement un tollé dans les organisations agricoles françaises (lire ci-dessous) et un peu de flottement au sein du gouvernement français. Dans une intervention prononcée hier lors du conseil de Killarney, M. Gaymard a ainsi mis en cause la méthode employée pour relancer le cycle de Doha. « La Commission accepte tout d’abord à l’OMC une méthode de négociation passant par l’étape intermédiaire d’un accord-cadre, méthode qui, s’agissant de l’agriculture, ne nous permettra de savoir si les intérêts offensifs et défensifs de l’Europe sont bien atteints qu’à la fin du processus, lorsque les chiffres et les détails auront été précisés ». En aparté, le ministre de l’Agriculture a accusé Bruxelles de courir le risque d’un « marché de dupes» avec les états-Unis se demandant si la Commission européenne n’avait pas, en l’occurence, « outrepassé son mandat ».

Les alliés font défaut

Pascal Lamy a répondu sèchement sur ce point : « nous n’aurions pas eu la majorité que nous avons eu vendredi dernier, si nous n’avions pas été à l’intérieur du mandat », a-t-il dit en référence à l’accueil réservé à cette initiative par le comité 133, qui réunit les hauts fonctionnaires des 25 états membres. Selon des sources européennes, seule la Hongrie, l’Irlande et dans une certaine mesure la Belgique avaient alors appuyé les critiques françaises.

Qu’en pensent les pays méditerranéens, habituels alliés de la France ? Sur ce point, les versions des participants divergent. Selon une source communautaire, Bruxelles aurait reçu le soutien non seulement des « libéraux» du nord de l’Europe mais aussi des pays méditerranéens. De son côté, un responsable européen assure que l’Espagne, l’Italie, le Portugal ou la Grèce n’ont pas pris position. La ministre espagnole Elena Espinosa n’a pas souhaité se prononcer à Killarney, où l’Italien Giovanni Alemanno était absent.

De son côté, l’Irlandais Joe Walsh, dont le pays fait lui aussi partie des alliés traditionnels de Paris, a évoqué un « bon accueil général » et, paralysé par la présidence de l’UE, passé sous silence l’opposition de Dublin en coulisses. Il a cependant minimisé lundi l’impact à attendre de l’initiative de la Commission. Selon lui, un accord à l’OMC avant la fin de l’année serait « très difficile » à obtenir « en raison des élections américaines». Il reste que symboliquement, une nouvelle étape psychologique a été franchie vers la suppression des restitutions.

Rédaction Réussir

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