La balle est entre les mains du Conseil constitutionnel
Le texte de loi devant permettre l’entrée en vigueur de l’écotaxe poids lourds le 1er octobre a été adopté le 24 avril par l’Assemblée nationale. Le lendemain, plus de 60 députés ont saisi le Conseil constitutionnel. Commentaire de Hugues Pouzin, directeur général de la CGI (Confédération du commerce interentreprises) : « Cette saisine conforte les doutes que la CGI avait toujours émis sur la constitutionnalité de ce texte, liés à la rupture d’égalité devant l’impôt entre transporteurs et grossistes-distributeurs, et à l’enrichissement sans cause. » La « rupture d’égalité » est soupçonnée par la CGI dès lors qu’un pied de facture permet au transporteur de faire payer de plein droit son client, tandis que le grossiste livrant lui-même ses clients ne le peut pas. « L’enrichissement sans cause » est un argument pointé à la fois par la CGI et Coop de France, qui représente les groupes coopératifs des différentes filières agricoles. Ces deux organisations pointent le fait qu’un transporteur pourrait obtenir de son client un paiement forfaitaire, établi par décret région par région, même quand il n’aura acquitté aucune écotaxe en circulant sur des autoroutes ou en dehors du réseau taxé.
Le Conseil constitutionnel a un mois pour se prononcer, ce qui retarde d’autant la promulgation de la loi, considère Hugues Pouzin (CGI). Or, il remarque au moins deux facteurs possibles de retard de l’entrée en vigueur de l’écotaxe au 1er octobre. Premier facteur : l’attente des décrets fixant les barèmes de l’écotaxe selon les types de poids lourds. Exprimés en centimes d’euros par kilomètres, ils permettront de paramétrer les boîtiers qui vont équiper les camions.
Second facteur possible de retard : parmi les SHT (sociétés habilités de télépéage), certaines attendent que leurs équipements soient agréés. Ces retards laissent penser à Hugues Pouzin que l’écotaxe pourrait être reportée au-delà du 1er octobre 2013.
1 % du chiffre d’affaires des grossistes
Cet ajournement laisserait un répit aux grossistes-distributeurs. L’écotaxe poids lourds les met « dans une situation complexe inacceptable en ces temps de crise économique », alerte Marc Hervouet, président de la CGI. Les grossistes de Rungis, comme lui, et tous ceux qui vont livrer des produits frais aux métiers de bouche, ou des boissons aux cafés et restaurants dans les zones très urbanisées, circuleront dans des réseaux taxés très denses. Leur écotaxe dépassera largement, craignent-ils, 1 % de leur chiffre d’affaires, contrairement à l’argument du ministre des Transports au cours des débats parlementaires. Le système de répercussion voté le 24 avril vise ouvertement à protéger le secteur fragilisé du transport routier de marchandises. Le commerce de gros et le monde agricole vont chercher à obtenir des compensations.