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« L’autoconstruction a divisé notre investissement par deux »

Dans le Bas-Rhin, au Gaec ferme Kleinfeld, l’autoconception et l’autoconstruction à 100 % ont allégé de moitié en 2005 la facture de la stabulation. Le bâtiment vieillit bien et explique en partie la hausse de la productivité constatée depuis sa mise en service.

Avant de devenir éleveurs, Dominique et Guy Streicher étaient actifs dans la maintenance industrielle et la mécanique. Cette première carrière et un talent inné de bricoleurs leur ont été bien utiles il y a quinze ans quand ils ont décidé de passer de l’aire paillée à une stabulation en logettes creuses pour leurs vaches et leurs génisses. Ils ont cherché des exemples sur internet et élaboré eux-mêmes les plans de leur bâtiment. Dominique et Guy voulaient voir grand sans pour autant casser leur tirelire. « Notre objectif était de 110 vaches à terme, mais à l’époque nous n’en avions que 65 pour un quota de 600 000 litres. Rester dans un budget supportable impliquait l’autoconstruction », explique Dominique. Le chantier s’est étalé sur deux ans. Il a mobilisé les deux frères, un ami maçon, des membres de la famille dont un électricien de métier. Les grosses journées, jusqu’à huit personnes s’activaient durant quatorze à seize heures.

Le résultat est conforme aux attentes. Dominique et Guy ont choisi des matériaux qu’ils savaient travailler. Ils ont opté pour une structure métallique de type treillis dont la dimension (102 x 21,40 m) leur a permis de profiter d’un tarif de faveur auprès du fabricant qui a mis les plans en propre. Les fers ont été choisis galvanisés ; ils ne sont pas à mettre en peinture et s’avèrent plus faciles à monter. Les pignons sont seulement partiellement fermés. Des tôles perforées laissent passer l’air aux façades sud et est. Les deux frères ont écarté le caillebotis intégral pour s’épargner toute émanation de méthane au profit du béton plein. Ils ont défini deux couloirs de raclage. Le premier longe la table d’alimentation. Large de 4,50 m, il autorise la circulation permanente des vaches derrière celles qui ont leur tête dans un cornadis. Le second se contente de 3,80 m. « Plus étroit, nous n’aurions plus pu manœuvrer pour ramener le sable qui sert de litière », signale Dominique. Les racleurs droits ont été vite remplacés par des modèles en V, assurant plus de propreté du sol. Pour compenser l’usure accrue du matériel par le sable, des fers de charrue sont soudés tous les six mois environ sous les lames au contact du béton. La double rangée centrale de logettes est large de 5 mètres. Elle est coupée par quatre passages équipés d’abreuvoirs de 180 x 40 cm qui débitent 70 l/h. Deux autres viennent en appoint. « Il en faudrait un de plus en sortie de salle de traite car le nombre de vaches a augmenté », concède Dominique.

 

« Un bâtiment simple qui fonctionne bien »

Six ventilateurs de 1,40 m de diamètre d’une puissance de 1,1 kWh chacun brassent l’air à partir d’une température ambiante de 20°C en hiver (pour renouveler l’air) et de 22°C en été. Une sonde déclenche de minute en minute une brumisation à partir de 25°C en diffusant l’eau d’un puits prélevée à 6°C. « La ventilation produit un courant d’air qui fait baisser la température de 1 à 2°C. La brumisation permet de gagner 4°C », indique Dominique. Un peu moins de la moitié du couloir de raclage le plus étroit fait office d’aire d’attente. En attendant la pose d’un chien électrique, les éleveurs manipulent deux barrières pour ramener les vaches vers une salle de traite 2x9 postes en épis 50°. « La stalle robotisée que nous avions visitée à l’époque ne nous avait pas convaincus. Mais le sujet sera sans doute repris par Léo, mon fils, qui compte s’installer en 2020 », commente Dominique.

L’infirmerie de 9x5 m qui est accolée au bloc traite est équipée d’un palan pour aider les animaux ayant des problèmes locomoteurs. Quatre box d’isolement 3x3 m ont été prévus au bout de l’aire d’attente pour permettre à l’inséminateur d’intervenir en totale autonomie et en toute sécurité. Une ancienne fumière a été transformée à peu de frais en un appentis de 24x12 m côté ouest. Il comporte trois box de vêlage 6x9 m sur paille et un espace de stockage pour le sable de la litière. Enfin, l’auge couverte prolonge le bâtiment pour lui octroyer un couloir d’alimentation de 5,40 m. « Nous voulions pouvoir y entreposer du fourrage comme le foin », complète Dominique. Avec la fosse 22x23 m de 2 mètres de profondeur, la dépense s’est limitée à 340 000 € HT, soit 2 573 € par place. Imbattable !

 

 

 

 

 

 

 

 

"C’est un bâtiment simple qui fonctionne bien et dont on peut moduler les espaces. Il permet des performances intéressantes en lait. Je lui attribue la moitié des 4 000 litres de moyenne qui ont été gagnés. L’autre moitié revient à la stabilité sur la durée d’une ration mélangée à base de maïs ensilage, de drèches de brasserie et de soja, de pulpes, de tourteau de soja extrudé et de colza, d’aliment liquide et de foin avec du concentré distribué au DAC », juge Dominique Streicher. Les éleveurs songent à quelques améliorations, comme installer cinq sprinklers pour rafraîchir le toit en plaques eternit qui chauffe trop par temps de canicule. Ils envisagent la pose d’un tapis sous la litière sable de leurs box d’isolement afin de bien collecter et faire s’écouler les jus. Si c’était à refaire, ils laisseraient un dégagement plus important aux logettes de la façade est, car elles sont moins fréquentées en raison de la proximité du mur. Ils isoleraient le toit et prolongeraient leur 18 mètres de barre au garrot sur une plus grande longueur. « Les vaches la préfèrent aux cornadis qui nous sont revenus à 700 euros la travée. C’est une économie facile à faire», calcule l’éleveur.

Chiffres clés

SAU 175 ha dont 52 ha de cultures
Cheptel 110 Holstein à 13 300 kg au contrôle laitier
Droits de livraison 1,4 Ml
Main-d'œuvre 3,75 UMO
 

Avis d'expert : Patrice Denni, conseiller bâtiment à la chambre d'agriculture d'Alsace

« Un bâtiment formule 1 ! »

« Ce type de bâtiment à trois rangées de logettes est le plus intéressant d’un point de vue coût car il est extrêmement compact. Le fait d’utiliser des ressources provenant d’entreprises de proximité et de se rabattre sur un kit pour la structure métallique sont deux autres facteurs qui en limitent la dépense. L’orientation Sud-Est qui privilégie le soleil matinal est idéale. Les éleveurs ont fait des choix simples pour organiser la circulation et assurer le confort des animaux. Ils sont propres et très à l’aise pour se déplacer. Ils se lèvent et se couchent sans souci grâce à la planche d’arrêt en tête de logette. On ne constate ni jarrets gonflés, ni écorchures. C’est une vraie formule 1 du bâtiment ! Vu le gabarit moyen élevé des vaches, élargir le bâtiment d’un mètre serait aujourd’hui judicieux. On pourrait rajouter cinquante centimètres au tête-à-tête et trente autres centimètres côté mur à l’Ouest ».

 

Le coût réactualisé sans autoconstruction         

Les prix ci-dessous sont valables pour un chantier entièrement confié à des prestataires extérieurs, raccordements aux réseaux non chiffrés.

° Stabulation :
- 172 logettes (100 pour les vaches + 72 pour les génisses soit l'équivalent de 134 logettes VL) en lisier raclé soit 134 x 2 937 € x 1,0763 = 423 586 €
- appentis génisses suitées et vaches taries : 34 760 € x 1,0763 = 37 412 €
Total stabulation (tous équipements inclus) : 460 998 €

° Bloc traite (aire d'attente et laiterie incluses) :
- bâti : 108 562 x 1,0763 = 116 845 €
- équipement : 2x9 postes : 96 750 x 1,060 = 102 555 €
Total bloc traite : 219 400 €

° Stockage effluents :
Fosse rectangulaire découverte profondeur 2 m : 1 012 m3 x 85 x 1,0763 = 92 583 €

Total : 772 981 € pour 134 équivalent places vache soit 5770 € par place.

Source : Service bâtiment chambre d’agriculture d'Alsace

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