Bioéthanol
Nouveau coup dur pour la filière
Le gouvernement a supprimé dans la loi de finances rectificative le traitement préférentiel lié à l’écopastille accordé aux véhicules Flex-fuel
Amère surprise que celle réservée par l’Assemblée nationale et le Sénat aux milieux agricoles juste avant les fêtes. Ils ont en effet remis en cause, par le vote de la loi de finances rectificative pour 2007, le 20 décembre, un volet important de soutien public aux véhicules Flex-fuel. Ceux-ci seront traités comme les autres, avec un malus, au regard de la nouvelle législation sur l’écopastille. Après la décision de l’État de renforcer les taxes sur le biodiesel et le bioéthanol, les producteurs fustigent la « politique du n’importe quoi » du gouvernement.
Aucune lisibilité sur la ligne politique du gouvernement
Alors que le Sénat, dans le cadre du débat sur l’écopastille, avait déjà réduit le dispositif préférentiel (appliquant la réduction de 50 %, non à l’estimation des émissions de gaz permettant de classer les Flex-fuel, mais seulement au malus lui-même), la CMP (Commission mixte paritaire Assemblée nationale-Sénat) a purement et simplement supprimé tout dispositif le 19 décembre. Le lendemain, l’Assemblée ratifiait le choix de la CMP en votant définitivement la loi de finances rectificative correspondant au projet du gouvernement. Un choix vivement critiqué par Charles de Courson, député Nouveau centre de la Marne. « Nous souhaitions prévenir une pénalisation excessive des véhicules Flex-fuel, selon deux voies possibles,déclarait-il en séance de l’Assemblée : soit l’exclusion de ces véhicules du champ de la taxation, soit un abattement de 50 % sur la taxe. Celle-ci a été repoussée en CMP, à notre grand étonnement et regret ». Le député revenait aussi sur la hausse des taxes sur les biocarburants : « Nous regrettons que le gouvernement ait réduit le niveau de la défiscalisation sur le bioéthanol et le diester, alors que la hausse des matières premières qui alimentent cette industrie a été considérable. Il y a là un problème de ligne politique et un risque de déstabilisation des industries concernées. De nombreux industriels se demandent s’ils vont bien ouvrir leur filière bioéthanol, car ils n’ont aucune lisibilité sur la ligne du gouvernement ».
« La France s’enfonce dans le n’importe quoi »
Chez les professionnels, la déception est à la hauteur des espoirs et des enjeux : selon Alain Jeanroy, coordonnateur du dossier bioéthanol pour la profession agricole, un véhicule Flex-fuel se trouvera donc, au regard des bonus-malus de l’écopastille, traité comme tout véhicule polluant. « C’est une remise en cause totale de la parole de l’État et de ses engagements antérieurs », affirme-t-il. Il craint que les constructeurs n’aient plus intérêt à construire et faire la promotion des Flex-fuel, véhicules consommateurs d’E 85 « qui constituent pourtant les modèles les moins polluants du moment ». Selon les producteurs (AGPB, AGPM, CGB), la filière Flex-fuel est « trahie par l’État ». « La France s’enfonce dans le n’importe quoi », insistait un communiqué diffusé le 20 décembre, mettant en parallèle le recul français et l’avancée « ambitieuse » de l’Europe sur la taxation des véhicules polluants.
De l’autre côté de l’Atlantique, les autorités persistent à l’inverse dans des politiques ambitieuses en faveur du bioéthanol : le Congrés américain a adopté, le 18 décembre, un projet de loi prévoyant des économies d’énergie sans précédent. Celui-ci entend quintupler la production de biocarburants en cinq ans. L’objectif est d’atteindre 164 Ml d’ici 2022. Le recours aux bois et déchets agricoles en tant que substrat devra par ailleurs être développé. Les constructeurs automobiles devront, eux, réduire la consommation d’essence des véhicules domestiques d’environ 40 %. Un texte que le président entend promulguer au plus vite.
Au Brésil, la flotte de Flex-fuel continue de progresser. Elle devrait représenter plus des deux-tiers du parc en 2015, selon les représentants des transformateurs de canne.