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Etude
L’agriculture n’échappe pas à l’hybridation du monde, selon la philosophe Gabrielle Halpern

Le monde agricole ne se conçoit plus en silos mais entre dans un phénomène d’hybridation observé dans d’autres domaines par la philosophe Gabrielle Halpern. Une chance pour les agriculteurs qui ne doivent pas avoir peur des néopaysans, qu’elle qualifie de centaures, selon l’étude publiée par la Fondation Jean Jaures pour le campus agricole Hectar.

centaure
Les Nima, pour Non issus du monde agricole (qui ceci dit n’est pas un phénomène nouveau) dans l’agriculture sont vus comme des centaures à suivre, selon la philosophe.
© Pixabay

Le phénomène d’hybridation touche le monde agricole et devrait s’amplifier selon la philosophe Gabrielle Halpern, auteure de l’étude Quand le monde agricole sera hybride publiée le 5 janvier dernier par la Fondation Jean Jaures pour le campus agricole Hectar fondé par Xavier Niel et Audrey Bourolleau. « Depuis plusieurs années, nous assistons à un phénomène d’hybridation du monde », est la thèse défendue par la jeune philosophe selon qui « est hybride ce qui est mélangé, hétéroclite, contradictoire ». « Autrement dit c’est le mariage improbable, c’est tout ce qui n’entre pas dans nos cases ! », explique-t-elle.

Objets, territoires, organisations, art mais aussi modes de consommation et de commercialisation s’hybrident avec l’émergence de centaures, « des individus hybrides, ayant un pied dans plusieurs mondes, plusieurs formations, plusieurs métiers » avec l’esprit d’entreprendre, selon Gabrielle Halpern qui voit aussi des signaux faibles du phénomène dans l’agriculture.
 

Des néoruraux vus comme des centaures

L’arrivée des Nima, pour Non issus du monde agricole (qui ceci dit n’est pas un phénomène nouveau), dans l’agriculture participe à cette hybridation mais aussi la diversification croissante des activités (circuits courts, méthanisation, photovoltaïque…) au sein des exploitations agricoles.

« Cette philosophie de l’entrepreneuriat, comme « pas de côté » et comme « prise d’initiative », commence à se déployer dans le monde agricole : expérimentation de nouveaux modèles économiques, de nouveaux circuits de distribution, de nouveaux partenariats, de nouvelles manières de cultiver et d’élever, de nouvelles manières de vivre et de travailler, de nouveaux modèles organisationnels », écrit la philosophe.

Cette explosion des cases apporte des bénéfices aux professionnels

Une explosion des cases qui « apporte des bénéfices aux professionnels », affirme-t-elle évoquant « diversification des revenus, plus grande autonomie, moindre dépendance dans la chaîne économique ou encore meilleurs équilibres de vie ».

Mais cette hybridation est « pleinement possible » « seulement si l’esprit scientifique d’expérimentation permanente des agriculteurs et éleveurs demeure », prévient-elle.

De nouvelles manières de cultiver la terre et d’élever les animaux apparaissent, pointe Gabrielle Halpern citant la mise en œuvre de pâturages tournants dynamiques, le modèle de laiterie basé sur une seule traite par jour ou encore l’utilisation de drones réduire l’apport d’engrais. « Une agriculture hybride est une agriculture qui réussira à hybrider différents types d’innovation (technologie, organisationnelle, économique, sociale, servicielle, etc.) pour les mettre au service d’[un] nouveau contrat naturel tripartite », écrit la philosophe.

Concept à la monde ou projet de société ?

« On voit apparaître de nouveaux liens, qui mettent l’agriculteur au centre des relations et du territoire », poursuit-elle, affirmant que « le monde agricole peut jouer un véritable rôle d’ancrage et de développement territoriaux ». Elle cite comme exemple la ferme du Moulin des Essarts, « moulin piloté par une paysanne-boulangère » qui est en train de se transformer en une forme de tiers-lieu ou encore la création d’une ferme urbaine dans l’écoquartier LaVallée de Chatenay-Malabry. « Pourquoi ne pas aller plus loin en imaginant des fermes-maisons de retraite ? Des espaces de coliving, de coworking et de formation installés dans les fermes ? », lance Gabrielle Halpern.

La philosophe conclut en appelant à voir dans l’hybridation du modèle agricole « non pas une simple stratégie ou un énième concept à la mode », mais « bien un projet de société, d’une certaine vision du monde, d’un certain rapport à la réalité, c’est-à-dire à la nature, à l’animal et à l’homme ». « L’agriculture en hybridations sera une agriculture capable de devenir un véritable point de repère dans notre société » termine-t-elle, appelant à voir en la figure du centaure (sous-entendu le néopaysan) « un messager, qui, avec sa flèche nous indique l’avenir et les moyens de nous hybrider pour nous réconcilier avec lui ! ».

Lire l’étude en entier :

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